- Marianne2007.info : Quel est le principal thème de campagne de Besancenot ?
Alain Krivine : Olivier Besancenot axe sa campagne sur le social. Mais sur le social concret, ce qui consiste à prendre toute une série de localités en détresse pour illustrer un problème national. A chaque fois il utilise sa notoriété en racontant ce qu’il se passe à Reynold’s ou à Aréva pour en faire un cas national.
- La gauche antilibérale a du mal à se remettre de l’échec de la candidature unitaire. Tous les débats tournent autour de cet échec. Vous sentez-vous piégé ?
Je pense qu’une partie de la gauche de la gauche a été piégé par le PC, ce qui a permis l’initiative plus ou moins heureuse de Bové. Toute cette expérience montre bien que dire non à un référendum sur une Constitution, ce n’est pas suffisant pour faire un programme.
- Olivier Besancenot se dit plus volontiers révolutionnaire que trotskiste. De quelle obédience idéologique se réclame la LCR ?
ll a raison de remettre en cause les « istes ». On est pas des talmudistes dogmatiques accrochés à nos livres sacrés. Le trotskisme, c’est un moment fort de l’histoire du marxisme révolutionnaire. Cela a été une bataille déterminée contre le stalinisme, cette espèce de déviation dramatique du communisme. C’était un moment précis qui a permis d’enrichir le programme des révolutionnaires sur l’internationalisme et sur la démocratie. En ce sens, on se réclame de ce combat mais pas que de ce combat. Aujourd’hui le trotskisme cela ne veut plus rien dire pour les gens. Nous sommes révolutionnaires, on se réclame du marxisme et d’autres révolutionnaires comme Baboeuf ou Guévara. Olivier a raison d’actualiser cela.
- Mais est ce qu’il n’y a pas un flottement idéologique à la LCR ? Vous êtes antisexistes, anticapitalistes, antihomophobes, antiimpérialiste. Etre "anti" suffit-il à construire un projet ?
On est dans l’anti parce qu’on rejette cette société avec tous ces aspects barbares. C’est pas seulement les mouvements d’oppression dans les entreprises. C’est aussi les phénomènes d’aliénation et d’oppression dans le reste de la société. Ce qui fait que nous sommes aussi à l’aise dans une usine qu’avec le mouvement des femmes, le mouvement des homosexuels ou les luttes écologistes. On part de l’idée que les gens sont en train de réaliser pendant cette campagne, que du berceau au cimetière on devient une marchandise. On ne fera pas une campagne présidentielle en négatif, on fera une campagne en positif en terme de projet alternatif. Pour montrer qu’il n’est pas inéluctable de subir cette société du profit et de la concurrence. Une autre société est possible et nous montrerons comment.
- Est ce que vous êtes pour un Smic à 1 500 euros ou plus ?
On est pour fixer le Smic à 1 500 euros net, à ne pas confondre avec le brut parce que 1 500 euros brut ce n’est pas une augmentation. C’est un minimum. Par ailleurs, nous proposons une augmentation des salaires de 300 euros. Car, aujourd’hui il y a deux problèmes principaux : le chômage et la question des bas revenus qui créent les bataillons des nouveaux travailleurs pauvres.
- Une partie de la LCR, investie dans les collectifs antilibéraux ne fera pas la campagne de Besancenot. Vous n’avez déjà pas beaucoup de militants, cela va-t-il peser ?
Ce n’est qu’une petite partie de la minorité qui ne s’engage pas derrière Besancenot. A la Ligue, si il y a des gens qui sont pas d’accord avec notre action, qu’ils ne la sabotent pas. Mais personne ne les oblige à mener ces actions avec nous. Donc, ceux qui ne sont pas d’accord avec la campagne Besancenot, ils militeront où ils veulent, ils feront autre chose, mais pas une autre campagne.
- Il est étonnant de voir qu’avec 3 à 4 000 militants vous aviez fait un score de 4,25% en 2002. Vous étiez le parti qui a obtenu le plus de voix avec le moins de militants. Comment expliquez vous cela ?
Il y a un décalage entre l’audience d’Olivier et celle de la Ligue. C’est clair. C’est lié à la personnalisation de la vie politique qui a pour danger de dépolitiser les personnes. Et il faut y faire attention. Je mentirai en disant qu’on n’utilise pas la personnalistation. Il y a des retombées sur la Ligue. Mais en même temps on est conscient, et Olivier le premier, du danger de cette dépolitisation.