Interview d’Alex Lollia du LKP au meeting NPA du 2 avril

, par LOLLIA Alex

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Le 2 Avril, s’est tenu à Montreuil un meeting du NPA auquel était invité M. Alex Lollia dirigeant de la Centrale des Travailleurs Unis (CTU) et du LKP.

Les rédacteurs d’Antilles Politique l’ont rencontré à cette occasion, ils vous livrent aujourd’hui le verbatim de cet entretien.

Vous êtes invités par le NPA à ce meeting, quel sera l’objet de votre intervention ?

Je vais présenter les origines du LKP, ce que nous avons fait exactement pendant les 44 jours de grèves, pourquoi les grèves continuent aujourd’hui et quels sont les perspectives d’avenir pour le le mouvement populaire Guadeloupéen.

Les grèves continuent, des point d’achoppement persistent sur la signature des accords Bino, pensez vous que si des avancées ne sont pas obtenues une mobilisation générale pourrait reprendre ?

Absolument, le MEDEF n’ pas encore signé l’accord Bino. Ce qui oblige les organisations syndicales a négocié les accords branche par branche et parfois entreprise par entreprise le fameux accord Bino. Aujourd’hui tous les patrons se réclament du MEDEF, ce sont des patrons de la 25e heure, ils se protègent derrière cette soi disant appartenance pour ne pas signer l’accord Bino.

Nous avons réagi au niveau de la CTU en continuant le Mouvement. Lors de la signature des accords le 4 Mars, nous avons bien senti qu’il y aurait eu problème, voilà pourquoi nous avons appelé à poursuivre le mouvement en dépit de la suspension de la grève générale.

Hier encore j’étais au port autonome pour signer un accord. En tout, depuis la suspension de la grève jusqu’à ce jour, la CTU a signé un peu plus de 200 accords, ça avance quand même, mais ce n’est pas facile. Il faut passer par des grèves, des mobilisations très dures, des blocages de locaux, jusqu’à la séquestration, mais nous disons que l’on ne peut pas jouer avec les salariés qui ont mené jusqu’à 50 jours de grève, parfois plus, pour la modification de leur pouvoir d’achat.

Un second problème, le préfet, qui a participé à la négociation entre les partenaires sociaux a écrit une lettre disant que les 100€ versés par l’Etat serait soumis à l’Art 241-1 du code de la Sécurité sociale, ce qui veut dire que ce n’est pas le salaire de base qui est pris en compte mais le salaire global annuel, comprenant toutes les primes. Ce qui écarte un grand nombre de salariés ayant un bas un salaire de cette participation de l’Etat.

Nous avons rien signé avec le préfet, nous avons signé l’accord Bino qui prévoit dans son article 3 que les salaires compris entre le SMIC et 1.4 SMIC bénéficieront d’une augmentation nette de 200 €. Maintenant si le préfet veut rallumer la mèche nous sommes tous disposer à étendre le feu dans la plaine.

Quid des Etats généraux annoncés par N Sarkozy et de l’implication du LKP ? Que peut-on en attendre ?

Ce n’est pas Monsieur Sarkozy qui va déterminer notre agenda. Et d’ailleurs, il faut revenir au sens originel du terme « Etats généraux » qui permettent la définition d’une constitution. Or il s’agit encore une fois pour Mr Sarkozy de discourir sur la situation et non pas d’avancer des propositions réelles concrètes permettant de trouver des solutions aux problèmes qui sont contenus dans la plateforme de revendication du LKP. Nous ne participerons pas à une mystification supplémentaire.

Mais les Etats Généraux ne vous semblent ils pas l’occasion de jeter les bases d’une nouvelle base institutionnelle ou d’aller ver une autonomisation ?

Nous ne sommes pas très institutionnels. Les élus Monsieur Lurel et Mr Gillot et autres Sénateurs et Députés qui sont en place depuis tantôt ont été incapables de faire avancer le dossier.

C’est le mouvement social qui fait avancer les choses donc si on croit que l’on va brider le mouvement social avec des Etats généraux factices, ceux là se trompent lourdement. Il faudrait peut être, me semble-t-il et cela n’engage que moi, organiser un congrès de fondation du peuple le même jour à la même heure que les Etats généraux. Et on verrait très clairement de quel côté penche l’aiguille de la balance.

Est-ce que le LKP ou ses leaders pensent aux échéances électorales ? Et à rentrer dans la vie politique avec des mandats électoraux ?

Peut être que certain le pensent. Mais le LKP n’y pense pas. Je crois plutôt que le LKP doit se maintenir dans ce qu’il est aujourd’hui, un contre pouvoir. Pour éclairer le peuple, l’aider à élever son niveau de conscience l’aider à s’organiser pour combattre toute espèce de Pwofitasyon, même dans le cadre d’une autonomie et surtout dans le cadre d’une indépendance. Il faut toujours un contre pouvoir qui sauvegarde les questions de liberté, les questions démocratiques, les questions d’autonomie des salariés. Il ne faudrait pas que nous ayons un Etat où comme dirait Césaire « Quelques nègres jouaient le blanc » sur le dos des Guadeloupéens et des Martiniquais.

Comment pensez-vous qu’à l’horizon 2012 les entreprises Martiniquaises et Guadeloupéennes puissent supporter les 200€ d’augmentation, puisqu’à un moment donné il y aura un retrait de l’État ?

Lors des évènements, j’ai écouté très attentivement les déclarations des patrons à la radio depuis mon lit d’hôpital, suite à l’agression par les gendarmes sur des barrages. Et je me rappelle qu’ils expliquaient qu’au 8 Février, ils avaient perdu 800 Millions d’€, la grève ayant démarré le 20 janvier. Autrement dit, quand les salariés travaillent, on leur dit qu’on ne peut pas les augmenter, l’économie n’avance pas, il n’y a pas d’argent. Et quand les salariés ne travaillent pas ils leur disent qu’ils perdent de l’argent. Je crois que les entreprises peuvent supporter parfaitement à l’horizon 2012 les 200€ d’augmentation. Et chose curieuse, ce sont d’abord les plus petites entreprises qui ont signé l’accord. Des patrons sont venus signés l’accord dans notre local. Ces patrons trouvaient parfaitement normal que les employés bénéficient de 50 € venant de leur fonds propres, 50€ venant des Collectivités territoriales et 100€ venant de l’Etat. Ils nous ont indiqué que « l’objectif c’est d’assumer les 200€, nous allons le faire ».

Les plus terribles, ce sont les grands patrons, non parce qu’ils ne peuvent pas le faire, mais parce qu’ils ne veulent pas le faire. En réalité, au-delà de la question de l’argent, il y a une question de rapport de force au niveau du terrain. De quel côté le rapport de force va pencher ? Est-ce que le grand patronat ne va pas perdre de sa superbe dans cette affaire ? Est-ce que les salariés ne seront pas plus hardis dorénavant ? C’est ce qui gêne le patronat et non pas les 200€.

Quelles sont vos relations avec le Collectif du 5 Février ? Elles sont de « bonne entente » ou cela va plus loin ?

Je suis Antillais, Je suis Guadeloupéen, et je me sens Martiniquais aussi, je ne fais pas la différence entre la Guadeloupe et la Martinique. D’ailleurs j’ai eu l’occasion d’aller avec Olivier Besancenot en Martinique pour tenir un meeting. Nous avons rencontré nos camarades du collectif du 5 février et nous rencontrons régulièrement, et je crois que c’est la voix que nous devons tracer : une unité des luttes en Guadeloupe et en Martinique et le plus souvent au même moment.

La querelle entre Guadeloupéens et Martiniquais n’a pas d’intérêt. Nous sommes des antillais, des Antillo-Guyanais et nous avons à nous construire dans la Caraïbe ensemble, c’est ce qui me paraît important.