Miguel Benasayag, philosophe et psychanalyste d’origine argentine, s’efforce aussi de donner un nouveau poumon libertaire au marxisme. Il a synthétisé ses perspectives dans deux livres : Du contre-pouvoir, en collaboration avec le philosophe argentin Diego Sztulwark [1], et Résister, c’est créer, avec la journaliste Florence Aubenas [2].
La nouvelle radicalité prônée par M. Benasayag retrouve une pensée de l’équilibre des pouvoirs initiée par Montesquieu (1689-1755). C’est ainsi comme « contre-pouvoirs » que s’affirmeraient les mouvements sociaux contemporains, la lutte pour « la prise du pouvoir » devenant « secondaire ».
Mais quand M. Benasayag et D. Sztulwark récusent toute « stratégie de changement global », on peut se demander s’ils ne perdent pas de vue le sens du global dans un « small is beautiful » trop idyllique. Ils proposent toutefois une analyse originale des rapports entre gestion et politique : « La gestion n’est pas ce qui s’oppose à la politique mais l’élément, en quelque sorte statique, qui surgit de la lutte dynamique, de la lutte politique. » Les deux pôles apparaissent nécessaires et complémentaires, bien qu’en tension.
La nouvelle radicalité s’assouplit également au défi de l’incertitude et de la fragilité. Ce qui la conduit à mettre en cause la sclérose des formes militantes traditionnelles, trop sûres de leurs « vérités », incapables d’explorer ici et maintenant d’autres modes de vie, repoussant dans un avenir lointain le moment où le bonheur pourra prendre le relais du sacrifice (le fameux « Grand Soir »). Le nouveau militant radical serait, quant à lui, un « militant-chercheur », expérimentateur. Mais faut-il faire son deuil, pour autant, de « l’ancienne forme du parti », comme ils le préconisent, ou tenter de la rénover ?
Miguel Benasayag et la logique du contre-pouvoir