Le quotidien Libération vient d’accorder un très long entretien à Paul Ariès, un des plus intéressants théoriciens de la décroissance. Il confirme qu’il a proposé au NPA de lui accorder une tête de liste aux élections européennes, « afin, dit-il, de montrer que la gauche en a fini avec le productivisme ». Comme sa candidature n’a pas été retenue, il en tire la conclusion que le NPA n’est « pas encore à la hauteur des enjeux historiques ».
J’ai toujours eu beaucoup de respect pour les pensées pionnières. Paul Ariès, comme Serge Latouche, comme avant eux René Dumond, sont d’indispensables précurseurs dans un monde où la pensée unique colonise et étouffe nos imaginaires. Mais, est-ce la déception de ne pas être candidat, je trouve que Paul Ariès tire des conclusions qui ne sont pas conformes à sa rigueur habituelle.
Il connaît parfaitement le formidable bond qualitatif qui s’est produit entre la décision de la LCR de se dissoudre et la fondation du NPA. Il connaît, pour avoir publié en janvier dernier dans son propre journal mon article sur l’écosocialisme, le débat qui nous conduisons sur une alternative au productivisme. L’intellectuel scrupuleux qu’il est ne peut pas ne pas avoir lu les principes fondateurs qui sont issus de ces débats et que nous avons adoptés lors de notre congrès.
Alors, j’ai envie de vous dire, Cher Paul, que le NPA mérite beaucoup mieux que ce renvoi aux archaïsmes d’une gauche qui n’est pas la nôtre. Relisez ces extraits ci-dessous de nos principes fondateurs et convenez que nous méritons mieux que des propos inspirés manifestement par une déception personnelle que je vous souhaite passagère :
« À l’évolution du capitalisme et l’extension de la sphère marchande à l’ensemble de la planète, correspond une crise écologique sans précédent. Si des sociétés humaines ont déjà eu à faire face à des crises environnementales du fait d’une utilisation non rationnelle de leurs ressources, c’est la première fois qu’une crise prend une telle ampleur, qu’elle concerne désormais tous les habitants de la planète et qu’elle amplifie d’autant les inégalités sociales.
Le socialisme que nous voulons : un écosocialisme
Pas plus qu’il n’y a de bon capitalisme productif, il ne peut y avoir de bon “capitalisme vert”. Parce qu’elle seule rendra possible des choix économiques démocratiques et rationnels, pris dans l’intérêt du plus grand nombre, la rupture avec le capitalisme est une condition nécessaire afin de stopper la crise écologique dont les effets catastrophiques commencent à se multiplier. Dans le cadre d’une nouvelle organisation de la société, dont la finalité sera l’utilité sociale et non plus le profit, les producteurs et les citoyens, autonomes et responsables, décideront de développer les activités économiques qui bénéficient à la collectivité, et écarteront celles qui mettent en danger les populations et leur environnement. Le socialisme que nous voulons ne propose nullement un développement illimité de la production, mais se fonde au contraire sur la satisfaction écologique des besoins sociaux : c’est un écosocialisme. Seule une société délivrée de la dictature du capital sera en mesure de réconcilier l’être humain et la nature.
Nos positions face à l’urgence écologique
L’urgence écologique implique de rejeter l’idée d’une expansion illimitée et dévastatrice de la domination de l’humanité sur la nature et par conséquent de toute forme de productivisme. Sur les questions climatiques, énergétiques et alimentaires, inverser la logique de destruction de la planète exige une planification démocratique. En opposition aux modes de production et de consommation actuels, nous proposons la relocalisation de l’économie, la redistribution des richesses, la décroissance de la consommation des ressources non renouvelables et la remise en cause de secteurs d’activité énergétivores, inutiles, polluants ou dangereux, en particulier le nucléaire.
L’eau, l’air, la terre et le vivant sont des biens communs non privatisables.
La maîtrise de leurs usages doit être au cœur de nos préoccupations.
Pour cela, les transports, l’eau, l’énergie, doivent être gérés par des services publics contrôlés par les salarié-e-s et les usagers, pour satisfaire les besoins sociaux, économiser les ressources et préserver l’environnement.
Nous luttons pour une sortie rapide de l’utilisation de l’énergie nucléaire.
L’agriculture n’a pas échappé aux effets dévastateurs du capitalisme en sacrifiant les paysans partout dans le monde au profit de l’agro-business et des spéculateurs de l’agriculture.
Il est urgent de mettre en place la souveraineté alimentaire, de redonner au territoire agricole sa vocation de production de biens alimentaires sains et de qualité, d’aménagement dans le respect de la terre et de l’espace rural.
Le maintien de paysan-ne-s, nombreux et vivant de leur travail dans une campagne vivante, favorisera la reconstruction du tissu social en milieu rural.
Le NPA s’oppose à toute production d’OGM. »
(extraits des principes fondateurs du Nouveau Parti anticapitaliste, adoptés lors de son congrès de fondation, du 6 au 8 février 2009).