« Réapprendre à se battre »

, par BESANCENOT Olivier, CAUDRON Céline

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Effervescence, ce vendredi après-midi à Tournai. Drapeaux, tee-shirts, tracts, le décorum est prêt pour accueillir « LA » guest star du jour : Olivier Besancenot. La famille des anticapitalistes a organisé une rencontre croisée de part et d’autre de la frontière. Conférence de presse à Tournai à 16h30, meeting à Lille dès 19h30. Entre ces rendez-vous, Olivier Besancenot, tête de liste européenne en France du Nouveau Parti Anticapitaliste (NPA), est venu prêter main-forte à sa « cousine » belge, Céline Caudron, du Parti socialiste de Lutte (PSL). Nationalisations, interdiction des licenciements, mobilisation jusqu’à la grève générale... Des slogans qui résonnent avec acuité en cette période de crise.

  • Olivier Besancenot, crise financière, Bourses mal en point, licenciements... C’est la révolution ?

Olivier Besancenot : C’est toujours l’heure de la révolution. Mais si la crise peut amener des résistances sociales qui débouchent sur des victoires, elle peut aussi engendrer l’individualisme, la xénophobie et le repli sur soi. Pour nous, une course de vitesse est donc enclenchée.

Céline Caudron : Et comme on a une droite vraiment à droite, il est très important d’avoir une gauche vraiment à gauche qui avance ses alternatives.

  • Avec vous, le courant trotskiste a changé de visages. Qu’en est-il de ses propositions ?

O.B. : On ne fait pas dans la démagogie moderniste. Il faut un mélange de jeunes et de vieux. Le NPA n’est pas trotskiste mais veut révolutionner la société. On essaie donc de construire l’outil politique dont la gauche révolutionnaire du XXIe siècle a besoin pour y arriver.

  • Le contexte semble mûr pour une alternative. Et pourtant, celle proposée par votre famille politique tarde à rallier les suffrages. Pourquoi ?

C.C. : En Belgique, on a oublié que nos acquis sociaux, sont le fruit de luttes. Ces acquis, ma génération a l’impression qu’on les lui a donnés. On doit réapprendre à se battre. Pour que ça bouge, il faut qu’on se bouge.

O.B. : Pour des gens qui n’y arrivent pas, nous ne nous débrouillons pas trop mal. En France, le NPA compte déjà 10 000 membres, alors que la LCR n’en recensait que 3 000. Nous connaissons nos limites mais nous voyons aussi les points que nous marquons.

C.C. : Notre force est que nous sommes engagés sur le terrain militant. Nous sommes des travailleurs, pas des politiciens bureaucrates. L’élection est pour nous une étape dans notre parcours politique mais pas l’essentiel, qui reste la mobilisation sociale.

  • Dans l’actuelle société, mobiliser semble plus ardu, non ?

O.B. : Cela fait partie des enjeux : recréer le sentiment d’appartenance à un collectif. Nous sommes dans une société qui cherche à diviser pour mieux régner. En réponse, il faut recréer ce sentiment d’appartenance de classe, la classe des exploités qui représente près de 85 % de la population. Ce prolétariat n’a jamais été aussi nombreux.

C.C. : Il y a aussi des résistances. Des graines de révoltes qu’il faut faire fructifier. Regardez à IAC, à Schaerbeek, contre le licenciement de travailleurs ; chez Carrefour, pour défendre le droit de grève. Il y a aussi des combats pour la dignité, comme celui des sans-papiers. Il faut à présent créer des ponts entre ces résistances.

  • Vos propositions relèvent plus de l’échelon de l’État-nation que de l’Europe. Cette élection, c’est un rendez-vous avant un autre ?

C.C. : Il ne faut pas transposer notre combat politique dans la réalité institutionnelle européenne actuelle. Les institutions européennes sont une mascarade pour nous faire croire à une Europe démocratique. Le Parlement européen n’a aucun pouvoir. Nous voulons construire une alternative. Nous n’avons pas un modèle clé en main mais ce doit être quelque chose qui reflète les besoins sociaux et environnementaux des populations.

O.B. : Renationaliser certains secteurs clés comme l’énergie ou les banques, cela peut venir au niveau national mais cela remet surtout en cause la politique européenne actuelle.

  • Quelles sont vos principales propositions électorales ?

C.C. : D’abord, articuler des mesures d’urgence : interdiction des licenciements, augmentation des salaires et réduction du temps de travail. Car, dans les années 70, on vivait beaucoup mieux qu’aujourd’hui. Il faut pouvoir imposer cela par le rapport de force. Ensuite, récupérer le secteur des banques pour en faire un service public contrôlé par les travailleurs et les usagers. C’est important pour préserver l’emploi. Sinon, les banques vont continuer à fonctionner dans le cadre de l’économie de marché et spéculer.

  • Votre ambition pour le 7 juin...

C.C. : Que cela continue après.

O.B. : Un maximum de voix pour qu’on puisse poursuivre avec enthousiasme. Mais on continuera.