« On ne sera pas là pour gérer le libéralisme ambiant »

, par TERRIÉ Julien

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Webmaster du site internet de campagne et militant, Julien Terrié, 28 ans, est numéro 14 de la liste « Debout ! ». C’est un acteur et un observateur avisé de ces échéances électorales. Il revient, à la veille du premier tour, sur les réussites, les attentes mais aussi les déceptions de la liste antilibérale.

  • D’où vient votre engagement politique ?

Je suis un sympathisant de la Ligue communiste révolutionnaire (LCR) depuis 1999 et adhérent depuis 2002. En fait, mon engagement politique s’est accéléré après mon licenciement abusif d’une clinique. J’avais organisé une grosse grève qui nous avait permis d’obtenir de réels avantages pour les salariés et ça n’a pas plu au patron. J’ai aussi pas mal voyagé dans le monde, notamment au Brésil et au Venezuela où des changements sont en train d’être opérés. Ça m’a fait réfléchir. J’ai participé à la création à Toulouse du cercle Venezuela pour la promotion de la révolution bolivarienne et aussi le groupe des Amis des Sans Terres Brésiliens.

  • Quel premier bilan peut-on tirer de cette campagne menée par « Debout ! » ?

La grosse satisfaction pour nous, c’est cet accord avec « les Motivé-e-s » et « l’Appel unitaire ». Ce n’était pas chose aisée car il fallait s’accorder politiquement après une présidentielle où les Motivé-e-s ont fait campagne pour Bové. Cela nous a permis de continuer le travail entamé par les Motivé-e-s sur le plan local tout en gardant l’identité politique nationale de la LCR. Je crois que c’est une bonne complémentarité. Ils ont amené un regard différent sur les dossiers de l’immigration et de la culture.

  • Des regrets ?

Oui, c’est dommage que pour nous la campagne ait commencé tard. Il fallait lever les méfiances et mettre de côté les distinctions politiques.

  • Vous vouliez faire une campagne différente de celle menée par les deux candidats Moudenc-Cohen. Peu de gros meetings politiques, de grands rassemblements, pourquoi ?

On voulait faire une campagne de terrain, au plus près des populations, avec un seul grand rassemblement à quelques jours du premier tour. D’ailleurs, la soirée de meeting avec Besancenot et les groupes de musique a été une franche réussite. On a eu aussi de très bons échos de la caravane « Debout ! » qui allait dans les quartiers pour dialoguer avec les gens sur des thèmes aussi variés que la petite enfance, le quatrième âge, etc. On préférait mener des actions ponctuelles contre la vidéosurveillance ou contre les groupes privés. Défendre les salariés de Carrefour ou cette femme de Virgin, victime d’un licenciement abusif, voilà une façon de faire campagne !

  • Arlette Laguiller, leader de Lutte ouvrière (LO), était jeudi en meeting à Toulouse. Elle dit que l’alliance avec la LCR était impossible car le parti est en travaux. Qu’en pensez-vous ?

C’est du pipo. Les Motivé-e-s et l’Appel unitaire ne sont pas engagés dans le processus de transformation du parti. Ce qu’on reproche à LO c’est de mener des alliances dans de nombreuses villes avec le MoDem. Ils n’ont pas la même vision que nous. Pour eux, on est dans une période « noire » de la politique. L’essentiel est de tenir avec le maximum d’élus alors que nous on pense que la période n’est pas si mauvaise que ça et qu’il y a de nombreuses résistances dans ce pays. C’est pour cela qu’on a décidé de créer un nouveau parti, pas de transformer la LCR. Afin de toujours lutter contre une bureaucratisation, on cherche à se renouveler. J’ai l’impression que l’héritage trotskyste de LO les verrouille alors que nous on essaye de se libérer des carcans idéologiques.

  • Ayant suivi de près cette campagne, quel est votre regard sur le traitement médiatique ?

On s’est rendu compte du problème du poids de La Dépêche du Midi sur l’opinion. Même s’il est relatif, c’est le seul journal local. Ils ont entretenu une confusion sur le fait que les Motivé-e-s étaient dispersés dans tous les partis. Mais c’est faux ! Les gens qui sont dans la liste de Cohen ou autres ont démissionné. La Dépêche a démenti après. Il y avait une volonté incompréhensible de ne faire apparaître que 4 candidats dans les médias locaux : Cohen, Moudenc, Forget et Simon. Je sais qu’il n’y a pas de loi de parité mais quand même c’est de la discrimination. Encore ce soir, sur TLT, sur le plateau, les 4 candidats occupent l’espace médiatique.

  • En ce moment, la popularité de Besancenot est au beau fixe. Il est considéré comme l’un des opposants politiques les plus crédibles à Sarkozy. Quelles sont vos attentes pour dimanche ?

Évidemment, la barre fatidique des 5 % sera très importante économiquement et politiquement. On pense que Cohen ne voudra pas s’allier si on fait moins de 5 %. Il ne le fera que si nous atteignons 6 ou 7 %. Si on est amené à s’allier avec le PS, on le fera en s’opposant contre leurs politiques libérales. On ne votera pas leurs budgets. On ne sera pas là pour gérer le libéralisme ambiant. Avoir des élus nous permettrait d’avoir des moyens dans les mouvements sociaux et les luttes futurs.

P.-S.

Propos recueillis par Charles Carrasco.
Article paru dans L’Express, édition du 9 mars 2008.

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