La gauche radicale insulaire du parti A Manca a tenu son congrès à Calvi. Alain Krivine était une nouvelle fois l’invité du week-end. Né en 1941 à Paris, le parcours de l’homme politique est marqué par des engagements, un activisme et un idéal fort.
Communiste, trotskiste et anti-Stalinien. Après les événements de 68, il fonde successivement plusieurs partis dont la Ligue communiste révolutionnaire (LCR). Il a été candidat aux présidentielles de 1969 et 1974.
En 2009, il est l’un des piliers fondateurs du NPA, sans toutefois faire parti de l’exécutif. Bien que la révolution souhaitée depuis plus de quarante ans n’ait toujours pas eu lieu, l’homme d’aujourd’hui apparaît en phase avec ses idéaux.
Censeur impitoyable du système actuel, Alain Krivine s’accroche à son modèle d’une société idéale : l’anticapitalisme est son credo. Dans sa lente spirale, il a entraîné de nouveaux acteurs, comme les candidats aux présidentielles, Olivier Besancenot puis Philippe Poutou.
À 73 ans, Alain Krivine se présente comme « un retraité actif ». Il est membre du comité politique central au NPA. En ces temps d’incertitudes, ses propos sont les mêmes. « Il faut continuer la lutte »car pour l’idéaliste convaincu : « Ce système ne tiendra pas. Il va s’écrouler ». Sans effet de manches, avec simplicité, il a répondu à quelques questions.
Quelles sont vos relations avec A Manca ?
Il n’y a pas de NPA en Corse car nous avons une attitude de principe : tous les peuples ont le droit à l’autodétermination. Nous appliquons donc cette attitude de principe : il n’y aura pas de NPA en Corse. De même qu’aux Antilles ou en Nouvelle-Calédonie. A Manca est une organisation sœur, nous entretenons des rapports de solidarité. Nous soutenons leurs actions et pouvons partager des réflexions, notre parti n’intervient pas dans les décisions. Et nous invitons les camarades insulaires qui souhaitent militer, à se tourner vers l’organisation Corse. C’est dans cet esprit que nous avons soutenu le LKP* et le mouvement populaire en 2009 lors des grèves aux Antilles.
Le NPA est toujours inscrit dans un engagement contestataire voire révolutionnaire ? Concrètement qu’est-ce que cela veut dire en 2014 ?
C’est simple : soit on renverse le pouvoir, soit on fait de l’austérité, c’est-à-dire du replâtrage ! C’est ce que fait la gauche actuelle. Dans ce contexte exceptionnel de crise, il est nécessaire de changer fondamentalement la société : c’est-à-dire de révolutionner son fonctionnement. Nous avons des propositions concrètes qui d’ailleurs étaient détaillées dans le programme de Philippe Poutou aux présidentielle de 2012. Notamment une répartition différente des richesses, ou encore que la collectivité s’approprie les moyens de production, et que la population puisse avoir un droit de contrôle sur ces systèmes, y compris ceux de la finance… Cela suppose aussi une réorganisation du fonctionnement des élus et de leur rémunération… Mais, en période de désarroi, il n’est pas simple de rendre crédibles des solutions radicales ou alternatives.
Le NPA a ajouté — entre autres — dans ses principes fondateurs l’écosocialisme, pourquoi ?
Aujourd’hui, le problème de l’écologie devient central. Il est directement lié à un projet de société. Un écologiste qui n’est pas anticapitaliste est manchot !
Le NPA compte environ 2 500 adhérents, quelle ouverture voyez-vous aujourd’hui pour la gauche radicale ?
Être de gauche ou de droite n’a plus la même signification qu’il y a trente ans. C’est aussi un questionnement fondamental qu’il faut avoir. Le militantisme semble passé, nous avons encore le sentiment d’être à contre-courant. Mais, il nous faut absolument poursuivre notre route, rester radical et indépendant. Il faut continuer à occuper le terrain idéologique et plus que jamais être anticapitaliste. La politique gouvernementale actuelle ne profite pas à la gauche anticapitaliste, elle profite surtout au Front national qui se construit parce que cette gauche au pouvoir fait la politique du patronat. Être à gauche aujourd’hui, c’est avoir le courage de s’opposer au capitalisme. C’est une ouverture et un choix indispensable pour une autre société.
*Lyannaj Kont Pwofitasyon en créole. Rassemblement contre les profits abusifs et l’exploitation.